samedi 30 juillet 2011

L’abus sexuel dans les sports et loisirs…


 
Beaucoup de bonnes gens se sont attardées au phénomène de l’abus sexuel, mais très peu se sont intéressées (ou s’intéressent encore) aux abus sexuel dans les sports. C’est donc pour cette raison (parmi plusieurs autres) que j’ai décidé de m’y attarder. Pour de multiples facteurs, l’abus sexuel dans les sports et loisirs possèdent plusieurs particularités. Explorons donc ensemble ce phénomène.

Tout d’abord, il faut savoir qu’au Canada, plusieurs millions de jeunes de moins de 18 ans pratiquent un sport : il s’agit donc d’un terrain de chasse particulièrement intéressant pour de possibles abuseurs sexuels. L’abus sexuel étant un abus de pouvoir, il faut donc qu’il y ait position d’autorité et dans le monde du sport et des loisirs, les entraîneurs sont donc assis dans une chaise de choix pour être en autorité vis-à-vis des jeunes. Un ou une entraîneur(e) gagnant souvent facilement la confiance des ses joueurs (nous les appellerons ainsi), il peut alors malheureusement abuser de cette confiance.

Souvent, les abuseurs sexuels promettent des avantages aux victimes pour qu’elles se taisent, pour qu’elles « acceptent » de continuer de se faire abuser, etc. Dans le monde du sport, quelques cas ayant été rapportés (celui du joueur de hockey Sheldon Kennedy étant le plus connu), l’abuseur peut très bien promettre des possibles améliorations de situations. Par exemple, il peut amadouer ses joueurs en leur faisant croire que s’ils acceptent de se faire abuser, il sera repêché dans un calibre plus élevé, qu’ils améliorent leurs chances de faire carrière dans leur sport, que l’entraîneur dira de bons mots à son endroit aux entraîneurs des rangs supérieurs, etc. Les entraîneurs sont souvent que très peu conscients du pouvoir qu’ils possèdent, et du privilège que cela leur accordent vis-à-vis les jeunes. Malheureusement, certains s'en servent à tort de ce privilège.

Pourquoi le milieu du sport est-il un endroit privilégié pour de potentiel abuseur ? Pour de nombreuses raisons que voici. Il y a des gens en très grande quantité, c’est donc facile de passer inaperçu; les entraîneurs possèdent un pouvoir énorme sur leurs joueurs, il est très « naturel » pour un jeune sportif de faire confiance à son entraîneur apparentant à groupe souvent vu comme des modèles ou des idoles. Il y a souvent possibilité que les entraîneurs aperçoivent les jeunes joueurs lorsqu’il sont nus, etc.

Pour toutes ces raisons, plusieurs règles sont donc à suivre pour permettre aux entraîneurs de se prémunir et aux joueurs de se protéger de possibles abus sexuels. Par exemple, un entraîneur ne doit jamais être seul avec un joueur : il doit toujours y avoir deux adultes en présence du jeune, pour protéger ce dernier et pour protéger l’entraîneur d’une possible fausse accusation. La seule occasion où l’entraîneur peut être seul avec un jeune est si ce dernier demande lui-même à parler avec lui, pour la simple raison que l’entraîneur pourrait, sans le savoir, amener comme témoin la personne de qui l’enfant voulait parler au préalable. Cependant, dans ce cas-ci, il est aussi important de suivre des règles de base si vous êtes seuls avec un jeune : soyez à la vue d’un autre adulte (fenêtre ou porte ouverte d’un bureau), soyez certain que personne ne vous entend pour respecter la confidentialité des jeunes, dites toujours à un autre adulte que vous êtes à tel endroit avec tel enfant, etc. Simple au fond…

C’est ce qui nous amène au point souvent. L’entraîneur étant un modèle, il se peut fort bien que ce dernier soit devenu un confident pour les jeunes qui se seront peut-être fait abusés sexuellement ( ou tout autre type d’abus ) à l’extérieur du monde de leur sport et qu’ils aient besoin d’en parler à quelqu’un. Encore une fois, il y a des règles strictes à suivre dans de telles procédures; non seulement nous devons suivre les règles ci-haut mentionnées, mais nous devons aussi suivre les règles suivantes : soyez empathiques, calmes, ne portez pas de jugement, ne promettez pas de garder le secret (le jeune risquerait d’être trahi une seconde fois, ce qui sera très dur pour lui), dites au jeune qu’il a bien fait de parler, dites au jeune que vous allez l’aider dans le meilleurs de vos capacités, ne posez jamais de questions suggestives (cela ne sera pas reçu en cours), dites au jeune qu’il n’a pas à se sentir coupable de la situation et que le seul responsable de l’abus et l’abuseur lui-même, etc.

Bref, la clé, comme dans beaucoup d’autres domaines, est la prévention : si facile, mais si simple à oublier. Le côté moins visible de la prévention est que jamais ou presque nous saurons que nous avons prévenus un abus. Cependant, vaut mieux ne pas savoir que nous avons prévenus un abus que de savoir que nous n’en n’avons pas prévenu un. J’espère que ce texte vous sera utile dans cette jungle qu’est le monde du sport et si vous vouliez vous attelez d’avantage, vous trouverez ici-bas un ouvrage très utile sur le sujet. Bonne chance !
Jean-Michel Soulard, B.A., DESS Santé Mentale
Sexologue-Éducateur

Auteur du livre : Knock-Out!, Combattre l’abus sexuel dans les sports,
Éditions d’ici Là, 2003, 72 pages.

Bibliographie
- AMYOT, Lyse, “L’analyse des besoins en formation à l’éducation sexuelle des éducatrices en garderie”, 1992, Rapport d’activités, maîtrise, UQAM
- Association Canadienne de Hockey, “Fair play means safety for all”, 1997
- Association Canadienne de Hockey, “Dis-le”, programme de prévention des abus, révisé le 24 avril 1998
- Association Canadienne pour l’avancement des Femmes, du sport et de l’activité physique, «Le harcèlement dans le sport», 1994
- AUBUT, Jocelyn «Les agresseurs sexuels: théorie, évaluation et traitement», et coll., Édition de la Chenilère, Montréal, 1993, 327 pages
- BERRICK, J.D. «Parental involvement in child abuse preventing training: What do they learn? Child abuse and neglect.», 1988, vol. 18, pages 331-340
- BRAKKENRIDGE, C.H & KIRBY, F.L. «Playing safe: assessing the risks of sexuel abuse to elite child athlètes», 1997, International review of Sociology of Sports
- GIBSON, Laura E. & LIETENBERG, Harold, «Child sexual abuse prevention programs: Do they decrease the occurrence of chikld sexual abuse?», Departement of Psychology, University of Vermont, Burlington, VT, USA, 2000, pages 1116-1123
- Gouvernement du Québec, «Les agressions sexuelles STOP: des activités réalistes et réalisables». Rapport du groupe de travail sur les agressions à caractère sexuel., 1995, 157 pages
- Gouvernements du QuébecOrientations gouvernementales en matière d’agression sexuelle: plan d’action», 2001
- HÉBERT et TREMBLAY, «La prévention de l’agression sexuelle à l’égard des enfants», 2000, dans F. Vitaro, et C. Gagnon (Eds), «La prévention des problèmes d’adaptation chez les enfants et les adolescents» Ste-Foy, Presse de l’université du Québec
- KIRBY, Sandra, L., & GREAVES, Lorraine, «Un jeu interdit: harcèlement sexuel dans le sport», 1997, Vol. 10, #1, pages 5-33
- LAVERGNE & TOURIGNY, «Incidence de l’abus et la négligence envers les enfants: reconnaissance des écrits», 2000, Criminologie, 33 (1), pages 42-72
- Ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, Gouv. Du Québec, «Les abus sexuels dans le sport amateur: guide de prévention et d’intervention destiné aux administrateurs sportifs», 1994, 64 pages
- NIELSEN, JAN & TOFTEGAARD, «The forbiden zone: intimacy, sexuel relations dans misconduct in the relation between coaches and athletes», 2001, Vol 36, #2, Junes, pages 165-182
- Régie Régionale de la santé et des services sociaux, Montérégie: “Guide d’implantation d’une politique de prévention en matière de violence et d’agression sexuelle”, 2001
- ROBERT, Jocelyne, “Te laisse pas faire!”, Édition de L’Homme. 2000
- VALOIS, Marie-Josée, Unité Régionale de Loisir et de Sport du Centre-du-Québec, “L’enfance c’est sacré”, 2001, 8 pages
- VALOIS, Marie-Josée, Secrétariat au Loisir et au Sport, “Harcèlement et abus sexuel, ça existe, soyez attentifs”, 2001, dépliant de sensibilisation.

Source : http://elysa.uqam.ca/elysa.htm

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